Aujourd’hui, étape de montagne, le rythme du levé tôt étant inné, c’est à 7h que je vais sortir la tête, une heure plus tard le moteur est démarré. Il faut que je pense à me prendre de vieux chiffons pour la rosée matinale les prochaines fois. Un nettoyant casque et bulle serait un plus. La routine installée, je vais prendre le p’tit dej au village ainsi que de quoi manger pour le midi, ce qui évitera une pause supplémentaire, je ne savais pas où la faire de toute façon. Enfin, l’essence pour la journée et je suis parti !
Je m’amuse à voir les enfants aller à l’école, j’avais encore oublié quel jour nous sommes, je pensais que tout le monde était en vacances moi ! J’écoute aussi les locaux, ils parlent plus italien que français, j’ai l’impression. Il y a également plus d’immatriculations italiennes que françaises. Les voitures italiennes se trouvent sans doute quelques kilomètres plus bas, vers Monaco ou Nice.

Le programme est simple aujourd’hui : virages, col, virages, paysages, col, paysages, col, virages. En gros. En quittant Tende, je me retourne pour vérifier la vue, première photo. Je rattrape également les quelques unes que j’ai loupé hier dans les gorges.

Je repasse par Sospel, puis commence mon ascension par la Route des Grandes Alpes avec le col de Turini. Il porte bien son nom, celui-là : la route qui y mène donne le tournis ! Un serpentin taillé sur le flanc de la montagne, lorsque cela a été nécessaire, les épingles prennent leur appui quelques dizaines de mètres plus bas pour monter d’un cran et reprendre le flanc. La route est tellement sinueuse que l’on peut apercevoir les morceaux qui nous attendent de l’autre côté du vallon abyssal formé par les pentes. Absolument fantastique, les quelques photos ne rendent pas justice.
Je ne peux m’empêcher de penser que les motards de l’époque napoléonienne avaient dû s’éclater lorsque le goudron était encore bon. La route est, de base, plutôt dangereuse : relativement étroite, à flanc de montagne, pas trop de quoi se rattraper si l’écart est trop important sur la droite. Mais en plus, je ne sais pas trop si elle tient bien, par endroit les services publics ont décidé de mettre quelques gravillons. À cette altitude. Avec cette humidité. Et j’imagine que la neige ne fait pas semblant de tomber lorsqu’elle tombe. 😰

Déjà arrivé au col, j’ai oublié de compter les épingles. Je suis plutôt déçu par ce premier : il n’y a pas grand chose à voir. Les sapins étant plus haut que moi et il n’y a pas d’endroit plus dégagé qu’un autre. La redescente est quasiment identique : la vue est bouchée par les pics, on voit toujours les morceaux de route plus loin. Le goudron est un peu meilleur, peut être.

J’arrive ensuite à La Bollène-Vésubie par la Tinée avec une vue imprenable, toujours en suivant cette Route des Grandes Alpes. Quelques virages plus loin, une partie de billard m’attend ! Cela n’empêche pas de regarder et de voir que le paysage a bien changé : les falaises sont devenues rouges, j’ai la rivière en contrebas  ainsi que quelques bunkers sur le bord de la route. En regardant de plus près, ils sont en position stratégique : impossible d’arriver d’un côté ou de l’autre sans se faire repérer. Si jamais quelqu’un arrivait à atteindre le bloc, vue la défense de la porte d’entrée, bon courage pour y entrer ! Assez incroyable de se dire que des soldats ont vécu ici. Certains sont ouverts et bien entendu… salle.

Je continue de me régaler sur ce billard, jusqu’à Isola. Ce n’était pas arrivé comme ça depuis longtemps ! Je monte à la station Isola 2000 puis jusqu’au col de la Lombarde, qui a sa petite réputation tout de même.
Je reconnais bien là les routes Alpines : personne dessus, larges, roulantes, de qualité, dénivelé important, vue dégagée et les parkings typique des stations de ski. J’adore ! Arrivé à 2350m, il est temps de manger, côté italien pour la frime, avec ce paysage idyllique. 😍

Après avoir trinqué à distance avec le serveur du snack, fini de faire sécher la serviette (Quechua c’est fantastique quand même), je redescend. Je compte 47 épingles, presque autant que sur le Stelvio. 😎
Je continue ensuite sur cette Route des Grandes Alpes 1, direction le point culminant de plusieurs choses : la journée d’abord, de tout mon road également et plus largement, de toute l’Europe accessible par la route. 2802 mètres 2. On l’aura deviné, il s’agit de La Cime de la Bonnette. La montée est magique, une route super propre, avec de une visibilité sur toute la vallée, sur les sommets, une lumière parfaite (que mon téléphone ne sait toujours pas rendre 😭 ). Quelques kilomètres avant la cime, les blockhaus des Fourches. De la même façon que pour les bunkers plus bas, il y a eu des personnes qui ont vécu ici. Je peux te dire qu’il valait mieux pas oublier le pain !

Encore quelques kilomètres pour l’arrivée. D’un coup, je suis sur une autre planète : la roche est noire, plus aucune trace de végétation, habituellement à cette altitude on croise plus de marcheurs expérimentés que de routes. La fameuse stèle est toujours bien présente, la photo de travers démontre encore mon impatience. 😁
À ce moment, j’hésite à prendre le temps de monter jusqu’à la cime ou repartir rapidement, plus à cause de la logistique que de la capacité physique. Je fini par me motiver pour l’ascension finale, ça serait dommage d’être venu jusque là et ne pas aller jusqu’au bout. De plus, je sais que je l’aurai regretté plus tard.

Effectivement, je l’aurai regretté plus tard. J’en prend plein les yeux et plein la tête. Encore un de ces moments que je voudrais partager mais où les mots ne suffisent plus, il faut le vivre pour comprendre. Un calme plat, pas de vent, le soleil, les nuages qui viennent faire de l’ombre de temps en temps et le tout en tee-shirt un 10 septembre. In-croy-able.
D’un coup je réalise… Je réalise que ce que je suis en train de faire est exceptionnel ! Ça fait un bien fou ! Pendant un instant, j’ai été seul sur cette table d’orientation à profiter de cet instant. Magique, apaisant, reposant.
Finalement, j’y resterai une demi-heure à profiter, me détendre, savourer cet instant de plénitude. Des choses plus rationnelles finissent par me revenir en tête : je suis le motard le plus haut d’Europe et avec mon mètre 87, ça ne va pas changer dans l’immédiat. 😂  J’ai dû me mettre quelques coups de pieds aux fesses pour monter, maintenant il va m’en falloir d’autres pour partir ! 😁

La descente ressemble assez à la montée dans un premier temps avec toujours la même envie de m’arrêter de partout. Le point d’information est fermé, ce n’est pas ici que j’obtiendrais mon badge Route de la Bonnette. Quelques endroits me refont penser aux Dolomites également : un bloc de pierre qui sort du sol sans raison apparente avec la couleur des paysages.

Un air de Dolomites

En suivant la route du Col de Vars, je tombe sur un musée de la moto : mot’art. Des pièces magnifique, dans un superbe état. Toutes fonctionnent à l’exception de 3 : deux guzzi et une allemande pour cause de pièces difficile à trouver. L’allemande, semble être inconnue des français et… des allemands eux mêmes ! La Ducat fonctionne bien aussi pour peu que l’entretient courant soit effectué correctement.

J’arrive finalement au col de Vars, à cause du vent, il est plus frais qu’à la Bonnette, malgré son 2300m. La barre des 1700m d’altitude se fait ensuite sentir par le changement de température, puis celle des 1500m, le repère sera identique le lendemain. 🙂  Encore quelques virages, pour atteindre la vallée suivante, toujours ces paysages dont je ne me lasse pas et quelques noms insolites.

Arrivé enfin à Guillestre, je fais le plein par sécurité, les stations étant plutôt rares dans le coin, puis le camping : installation et détente, demain c’est Izoard ! Pour la détente, je vais être servi, je recommande Le Cantinat Fleuri dans ce coin : presque tout seul, transat confortables, piscine chauffée (plus ou moins), la tente est dans le verger (les pommes sont excellentes, demandez tout de même, ils en font la cueillette).
Une fois la petite baignade bien méritée, la discussion avec mon hôte m’a permis d’obtenir une nouvelle adresse : Le Regain. La carte propose un choix plutôt difficile ainsi qu’une suggestion de vin : aujourd’hui c’était Grain de Glace, de Saint-Tropez, je recommande. Les plats sont préparés quasiment devant toi, c’est un régal de voir l’équipe travailler ! Ici on se régale les papilles et les yeux ! Je vous recommande la pizza Campione, au feu de bois, s’il vous plaît ! 😍

Tout est parfait, au détail près de ce gros coup de chaleur de la semaine, lorsque je me rend compte que j’ai perdu ma carte pour payer le restaurant et du coup le camping. 😰  J’ai laissé mon téléphone en otage, je refais le chemin inverse, c’est finalement à l’accueil du camping que je vais la retrouver.

J’ai pu ajouter 296km au compteur, j’ai accumulé de la bonne fatigue, mais surtout des paysages absolument fantastique et ce n’est toujours pas terminé ! Demain va être également gé-nial !